Paroles d'escape
Zompa
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22.11.2020
A l’heure où les escape rooms sont contraintes de garder leurs portes closes, certaines enseignes ont décidé de continuer à divertir leurs joueurs confinés. Je suis partie (virtuellement bien sûr) à leur rencontre. Deuxième épisode avec Isabelle, fondatrice de Happy Kits, qui crée des jeux print & play jouables à la maison par toute la famille. Créer l’immersion directement chez les joueurs ? Oui, c’est possible!
Comme beaucoup, je commençais à m’ennuyer dans un poste salarié qui manquait de fun et surtout de sens. J’ai donc souhaité me lancer dans un projet personnel en parallèle de mon travail.
On vit dans une époque où retrouver la convivialité par le jeu est une valeur qui rassemble, et pour laquelle les gens sont prêts à dépenser de l’argent. Et comme je suis une passionnée de jeux, un projet de création de chasses au trésor pour les enfants a commencé à germer. Puis, lorsque les demandes ont vraiment augmenté et que les questions sur les jeux pour adultes se sont multipliées, je me suis lancée à temps plein dans l’aventure.
C’est sur ces bases qu’en 2016, Happy Kits est né, avec quelques produits pour enfants et pour adultes. En 2017, nous avons lancé un financement participatif pour créer un « Escape home ». L’idée était de concevoir les premiers escape games à la maison. Les jeux Unlock existaient déjà bien sûr (et d’ailleurs je suis une grande fan), mais nous souhaitions vraiment créer un jeu qui se joue comme une aventure dans la maison, où l’on fouille et on manipule comme dans une vraie salle d’escape game.
Aujourd’hui, notre collection d’Escape home a bien grandi, et c’est devenu notre produit phare !
Nous avons deux principes dans notre cahier des charges. D’abord, tout le monde doit pouvoir jouer à fond, quel que soit son âge ou son niveau. Nous avons une mécanique de jeu qui permet de faire participer les enfants à l’aventure. Ils constituent une équipe, et les adultes en forment une autre. Chaque équipe se voit attribuer des missions différentes. Les indices trouvés par les uns vont servir pour débloquer les autres. Nous pouvons même faire participer les enfants qui ne savent pas lire, d’une manière un peu différente.
Notre seconde contrainte, c’est que tous nos scénarios doivent se dérouler dans des univers « réalistes ». Contrairement à une salle d’escape game, nous ne pouvons pas créer l’immersion par l’effet « wahou » des décors. Il faut donc trouver d’autres moyens pour
rendre l’histoire crédible. Nous utilisons donc les décors à notre disposition : l’endroit où se trouvent les joueurs ! Les scénarios sont personnalisables et se déroulent à l’adresse où le jeu est organisé. Les histoires sont conçues pour rester réalistes en partant de l’environnement du joueur, qu’il connait bien. C’est comme cela que nous créons l’immersion, même à distance!
Il y a également un gros travail sur les émotions générées chez le joueur : frustration, excitation voir inquiétude… L’un de nos scénarios pour adultes a même réussi à mettre mal à l’aise certains joueurs : ils avaient l’impression que quelque chose d’étrange se passait réellement chez eux !
A l’origine, c’est moi qui créais les jeux, mais l’équipe a vite grandi.
Nous avons un pôle Créa composé de game designers et de graphistes. Les premiers sont centrés sur la mécanique de jeu. Ils sont formés en interne pour s’accorder avec notre méthode de création et nos contraintes. Selon moi, un bon game designer n’est ni un littéraire pur, ni un ingénieur pur, mais un peu les deux à la fois ! Il doit avoir de l’imagination, et être logique et rigoureux.
Quant aux graphistes, ils ne sont pas de simple exécutants, mais de vrais directeurs artistiques qui prennent en main la mécanique de jeu pour la remodeler si besoin. Ils travaillent en collaboration avec les game designers et traduisent visuellement ce dont le jeu a besoin pour que les énigmes et le scénario soient cohérents.
Même si notre activité auprès des entreprises a ralenti en raison des évènements annulés, tous nos serious game à distance ont été maintenus. Donc heureusement, personne chez nous n’a été mis en chômage partiel. Nous avons même lancé en septembre une nouvelle offre B to B de team building clé-en-main 100% digitale qui plaît beaucoup. Côté particuliers, cette fin d’année est toujours une période assez dense pour nous car les familles aiment commander nos jeux pour les fêtes.
Au quotidien il a fallu s’habituer à être souvent en télétravail, ce qui n’est pas vraiment la même chose que de travailler tous ensemble… Mais l’ambiance est très bonne dans l’équipe, alors on continue à faire nos brainstormings… et à jouer ensemble à distance!